Depuis cette semaine, les eaux provenant des cuisines et des toilettes irriguent cannes et légumes après épuration à la station de Saint-Martin. Par ailleurs, nos rivières virent couleur de boue et charrient toute la pollution des agglomérations vers le lagon et les réservoirs à chaque grande pluie. Du coup on s’interroge sur la qualité de l’eau potable et celle des lagons alors qu’à déjà éclaté une épidémie de gastro-entérite.
Boire l’eau, même claire, de nos rivières, personne n’oserait le faire. Trop risqué aujourd’hui.
Et ils sont de plus en plus nombreux ceux qui estiment que l’eau du robinet est aussi dangereuse. Une perception qui s’est installée depuis plusieurs années et qui a fait prospérer les entreprises qui mettent en bouteilles l’eau des nappes souterraines.
La confiance dans l’eau embouteillée a cependant pris un sérieux coup l’année dernière quand un des producteurs s’est vu contraint de retirer du marché une bonne partie de sa production en raison du fait qu’elle contenait un fort taux de bromate.
Alors, à quelles eaux se vouer ? Surtout quand l’eau est destinée aux nourrissons. «Je vous assure que l’eau du robinet que la Central Water Authority (CWA) distribue au public est aussi bonne, sinon meilleure que l’eau mise en bouteille», affirme Dev Gujjalu, chef ingénieur de cet organisme.
Mais comment expliquer alors la présence d’eau boueuse ou rougeâtre dans les robinets ?
Accident de canalisation à la CWA, tuyauterie défectueuse et réservoir d’eau mal entretenu chez le consommateur sont les trois raisons avancées par l’ingénieur pour expliquer ce fait.
«Les tuyaux galvanisés sont à déconseiller, car ils rouillent et retiennent des matières qui peuvent poser des problèmes de santé», explique-t-il.
La CWA qui puise ses eaux des rivières, des réservoirs et des nappes souterraines, a cependant des problèmes en période de grosses pluies. Souvent, des microsuspensions arrivent à passer à travers les filtres et le chlore n’arrive pas à détruire les bactéries logées à l’intérieur de ces suspensions.
«À ce moment, on conseille aux consommateurs de bouillir l’eau.» La CWA a 149 points à travers l’île où l’eau est régulièrement puisée et analysée. Le ministère de la Santé procède à des analyses parallèles. Mais il y a un hic dans ce système de surveillance.
La qualité microbienne de l’eau potable est évaluée essentiellement à l’aide de techniques de culture qui présentent deux désavantages quand il s’agit de doser l’eau traitée et désinfectée.
La culture n’arrive pas à détecter des agents pathogènes spécifiques mais s’appuie sur la surveillance de bactéries indicatrices, déjà connues, comme les coliformes et les entérocoques, qui révèlent la présence d’agents pathogènes microbiens d’origine fécale.
Le déversement ou l’infiltration des eaux usées dans le lagon a déjà donné des résultats catastrophiques de Pointe-aux-Sables à Baie-du-Tombeau. La baignade dans ces régions est déconseillée en raison du fort taux de coliformes fécaux.
Deux nouveaux agents pathogènes
Cette bactérie, qui provient des matières fécales, ne survit pas plus de six heures dans l’eau de mer. Sa forte présence indique une pollution par des eaux usées. Des baignades dans ces régions peuvent donner lieu à des diarrhées, surtout infantile, des démangeaisons et des rougeurs sur le corps.
Le ministère de la Pêche a 14 points de surveillance autour de l’île et Vinod Ratacharan, scientifique au centre de recherches d’Albion, indique que la pollution microbienne dans les eaux de baignade autour de l’île n’est pas élevée. «Tout est dans les normes imposées, hormis la région allant de Pointe-aux-Sables à Baie-du-Tombeau où nous avons placé des avis pou déconseiller la baignade.»
Or des organismes nouveaux sont apparus ces derniers temps et ont provoqué des gastro-entérites à grande échelle sans avoir été détectés. Le Campylobacter et le Cryptosporidium, pathogènes nouveaux contre lesquels luttent beaucoup de réseaux de distribution d’eau d’Europe, sont de ceux-là. L’efficacité et la fiabilité des méthodes de surveillance classique à travers la technique de culture sont de plus en plus remises en question et c’est la technique moléculaire qui est adoptée.
En Suède de 1980 à 1999, 116 épidémies de gastro-entérites ont frappé quelque 58 000 personnes. Le Campylobacter, a été détecté dans certains cas. Mais 70 % environ des épidémies étaient dues à des agents inconnus provoquant des gastro-entérites aiguës. Entre 1991 et 2000, le même scénario s’est répété en Grande-Bretagne avec 41 épidémies.
Faut-il un tel scénario à Maurice pour que les autorités repensent leur système de surveillance ?
L’eau usée dans les légumes
Une partie des eaux des toilettes des habitants des hautes Plaines Wilhems, avec ses matières fécales, est déversée dans la station de traitement de Saint Martin où elle est épurée avant d’être utilisée pour l’irrigation de la canne et des légumes. «Aucun risque pour la santé des consommateurs et pour l’environnement. Nous respectons les normes imposées par la FAO», explique un ingénieur de l’Irrigation Authority. Ses dires sont confirmés par les techniciens de la Waste Water Management Authority qui font des tests régulièrement sur la qualité de l’eau sortant de la station d’épuration de Saint Martin. Le procédé adopté par la station est le même que celui adopté aux états-Unis, en Europe, en Inde et en Israël pour traiter les eaux usées avant de les utiliser pour l’irrigation. L’eau passe par un traitement primaire pour l’épurer des matières solides, dont les matières fécales. Lors du traitement secondaire, qui est un traitement biologique, des bactéries sont utilisées pour débarrasser l’eau des métaux lourds, des excès de sel, etc. Le traitement tertiaire élimine, à l’aide des rayons U.V., les micro-organismes, bactéries, coliformes fécaux, etc. «L’eau est alors aussi propre que l’eau des rivières», affirme-t-on à Saint Martin. Quoi qu’il en soit cette eau est mélangée à 50 % avec l’eau du réservoir de La Ferme pour l’irrigation.
L’eau en bouteille : pas sans risques
L’eau mise en bouteille est puisée des nappes phréatiques, eau que la CWA utilise aussi. Mais contrairement à cet organisme, les producteurs d’eau mise en bouteille désinfectent leur eau avec de l’ozone et il y a à ce moment risque de formation de bromate, un produit cancérigène.
Le bromate est formé lors de l’ozonisation, quand l’ozone utilisé pour désinfecter l’eau potable réagit avec les ions de bromure naturellement présents dans l’eau. La quantité de bromate produite dépend de la quantité de bromure (présent naturellement) dans l’eau.
Des études de laboratoire ont démontré que des rats ayant bu de l’eau contenant du bromate développaient le cancer du système urinaire.
Dans certains pays comme le Canada, la présence du bromate est interdite dans l’eau potable. D’autres pays autorisent sa présence à faible taux. Celui qui est recommandé par l’Organisation mondiale de la Santé a été ramené à 25 mg de bromate par litre d’eau. Des analyses faites par le ministère de la Santé avaient indiqué un taux supérieur à 25 mg par litre d’eau chez un des producteurs. Ce dernier avait nié ce fait et indiqué qu’une alarme se déclenche au bout de sa chaîne de production quand un taux élevé de bromate est détecté dans les bouteilles d’eau.
Par ailleurs, l’ingénieur Gujjalu indique que l’eau en bouteille, parce qu’elle ne contient pas de chlore, ne doit pas être gardée pendant plus d’une journée après ouverture. «Parce qu’elle n’est pas protégée par le chlore, elle va se contaminer et s’infecter très vite», explique-t-il.
Le Site Source
Boire l’eau, même claire, de nos rivières, personne n’oserait le faire. Trop risqué aujourd’hui.
Et ils sont de plus en plus nombreux ceux qui estiment que l’eau du robinet est aussi dangereuse. Une perception qui s’est installée depuis plusieurs années et qui a fait prospérer les entreprises qui mettent en bouteilles l’eau des nappes souterraines.
La confiance dans l’eau embouteillée a cependant pris un sérieux coup l’année dernière quand un des producteurs s’est vu contraint de retirer du marché une bonne partie de sa production en raison du fait qu’elle contenait un fort taux de bromate.
Alors, à quelles eaux se vouer ? Surtout quand l’eau est destinée aux nourrissons. «Je vous assure que l’eau du robinet que la Central Water Authority (CWA) distribue au public est aussi bonne, sinon meilleure que l’eau mise en bouteille», affirme Dev Gujjalu, chef ingénieur de cet organisme.
Mais comment expliquer alors la présence d’eau boueuse ou rougeâtre dans les robinets ?
Accident de canalisation à la CWA, tuyauterie défectueuse et réservoir d’eau mal entretenu chez le consommateur sont les trois raisons avancées par l’ingénieur pour expliquer ce fait.
«Les tuyaux galvanisés sont à déconseiller, car ils rouillent et retiennent des matières qui peuvent poser des problèmes de santé», explique-t-il.
La CWA qui puise ses eaux des rivières, des réservoirs et des nappes souterraines, a cependant des problèmes en période de grosses pluies. Souvent, des microsuspensions arrivent à passer à travers les filtres et le chlore n’arrive pas à détruire les bactéries logées à l’intérieur de ces suspensions.
«À ce moment, on conseille aux consommateurs de bouillir l’eau.» La CWA a 149 points à travers l’île où l’eau est régulièrement puisée et analysée. Le ministère de la Santé procède à des analyses parallèles. Mais il y a un hic dans ce système de surveillance.
La qualité microbienne de l’eau potable est évaluée essentiellement à l’aide de techniques de culture qui présentent deux désavantages quand il s’agit de doser l’eau traitée et désinfectée.
La culture n’arrive pas à détecter des agents pathogènes spécifiques mais s’appuie sur la surveillance de bactéries indicatrices, déjà connues, comme les coliformes et les entérocoques, qui révèlent la présence d’agents pathogènes microbiens d’origine fécale.
Le déversement ou l’infiltration des eaux usées dans le lagon a déjà donné des résultats catastrophiques de Pointe-aux-Sables à Baie-du-Tombeau. La baignade dans ces régions est déconseillée en raison du fort taux de coliformes fécaux.
Deux nouveaux agents pathogènes
Cette bactérie, qui provient des matières fécales, ne survit pas plus de six heures dans l’eau de mer. Sa forte présence indique une pollution par des eaux usées. Des baignades dans ces régions peuvent donner lieu à des diarrhées, surtout infantile, des démangeaisons et des rougeurs sur le corps.
Le ministère de la Pêche a 14 points de surveillance autour de l’île et Vinod Ratacharan, scientifique au centre de recherches d’Albion, indique que la pollution microbienne dans les eaux de baignade autour de l’île n’est pas élevée. «Tout est dans les normes imposées, hormis la région allant de Pointe-aux-Sables à Baie-du-Tombeau où nous avons placé des avis pou déconseiller la baignade.»
Or des organismes nouveaux sont apparus ces derniers temps et ont provoqué des gastro-entérites à grande échelle sans avoir été détectés. Le Campylobacter et le Cryptosporidium, pathogènes nouveaux contre lesquels luttent beaucoup de réseaux de distribution d’eau d’Europe, sont de ceux-là. L’efficacité et la fiabilité des méthodes de surveillance classique à travers la technique de culture sont de plus en plus remises en question et c’est la technique moléculaire qui est adoptée.
En Suède de 1980 à 1999, 116 épidémies de gastro-entérites ont frappé quelque 58 000 personnes. Le Campylobacter, a été détecté dans certains cas. Mais 70 % environ des épidémies étaient dues à des agents inconnus provoquant des gastro-entérites aiguës. Entre 1991 et 2000, le même scénario s’est répété en Grande-Bretagne avec 41 épidémies.
Faut-il un tel scénario à Maurice pour que les autorités repensent leur système de surveillance ?
L’eau usée dans les légumes
Une partie des eaux des toilettes des habitants des hautes Plaines Wilhems, avec ses matières fécales, est déversée dans la station de traitement de Saint Martin où elle est épurée avant d’être utilisée pour l’irrigation de la canne et des légumes. «Aucun risque pour la santé des consommateurs et pour l’environnement. Nous respectons les normes imposées par la FAO», explique un ingénieur de l’Irrigation Authority. Ses dires sont confirmés par les techniciens de la Waste Water Management Authority qui font des tests régulièrement sur la qualité de l’eau sortant de la station d’épuration de Saint Martin. Le procédé adopté par la station est le même que celui adopté aux états-Unis, en Europe, en Inde et en Israël pour traiter les eaux usées avant de les utiliser pour l’irrigation. L’eau passe par un traitement primaire pour l’épurer des matières solides, dont les matières fécales. Lors du traitement secondaire, qui est un traitement biologique, des bactéries sont utilisées pour débarrasser l’eau des métaux lourds, des excès de sel, etc. Le traitement tertiaire élimine, à l’aide des rayons U.V., les micro-organismes, bactéries, coliformes fécaux, etc. «L’eau est alors aussi propre que l’eau des rivières», affirme-t-on à Saint Martin. Quoi qu’il en soit cette eau est mélangée à 50 % avec l’eau du réservoir de La Ferme pour l’irrigation.
L’eau en bouteille : pas sans risques
L’eau mise en bouteille est puisée des nappes phréatiques, eau que la CWA utilise aussi. Mais contrairement à cet organisme, les producteurs d’eau mise en bouteille désinfectent leur eau avec de l’ozone et il y a à ce moment risque de formation de bromate, un produit cancérigène.
Le bromate est formé lors de l’ozonisation, quand l’ozone utilisé pour désinfecter l’eau potable réagit avec les ions de bromure naturellement présents dans l’eau. La quantité de bromate produite dépend de la quantité de bromure (présent naturellement) dans l’eau.
Des études de laboratoire ont démontré que des rats ayant bu de l’eau contenant du bromate développaient le cancer du système urinaire.
Dans certains pays comme le Canada, la présence du bromate est interdite dans l’eau potable. D’autres pays autorisent sa présence à faible taux. Celui qui est recommandé par l’Organisation mondiale de la Santé a été ramené à 25 mg de bromate par litre d’eau. Des analyses faites par le ministère de la Santé avaient indiqué un taux supérieur à 25 mg par litre d’eau chez un des producteurs. Ce dernier avait nié ce fait et indiqué qu’une alarme se déclenche au bout de sa chaîne de production quand un taux élevé de bromate est détecté dans les bouteilles d’eau.
Par ailleurs, l’ingénieur Gujjalu indique que l’eau en bouteille, parce qu’elle ne contient pas de chlore, ne doit pas être gardée pendant plus d’une journée après ouverture. «Parce qu’elle n’est pas protégée par le chlore, elle va se contaminer et s’infecter très vite», explique-t-il.
Le Site Source